Novalis au vignoble – Choix de textes
**Qui offre quoi à qui
Hitchcock d’abord à Gogol la fenêtre
sur la cour des morts : Montparnasse !
Celui qui a des âmes a des eaux-de-vie maison
Baudelaire se tourmente parmi les beaux-pères
o généraux : les pauvres du monde !
Un pique-nique de lumière s’étale dessus
le troubadour est électrique j’entre
maintenant dans un chœur d’amour disais-je
moi apôtre idiot et je brûlais
la lumière me dévore maintenant immortelle
**Lumière
parle d’une inouïe
simplicité Lagrasse en septembre des liens
libérateurs enserrent nos mains nous
raillent complices les poèmes
sont des grains de blé ils démontent
les ponts nous nous sommes
rejoints à la nage
**Verlaine paon de nuit
qui tend maintenant la soie bleu
eau-dessus de ma tête chauve
qui jadis fut appelée la grâce
un dieu gras avec pour gourdin son portable
m’envoie d’autres prisons et de la lavasse stalinienne
ô absinthe wormwood moyen
puissant contre les parasites
ô toi huile d’absinthe tuant
le dieu-vermine et le dieu-insecte
ô vermouth ô vers
ils me graissent les articulations
pour les prochaines montagnes russes
la kalachnikov rose religieuse
de ma langue se défait de sa paralysie
la fée verte me scanne
les côtes roses framboise
me crache sur les yeux fainéants
je les ferme avec mon meilleur juron
**Hiver & Éros
le vignoble est le dernier
Éros hivernal et parcimonieux
qui balbutie
embrasse – raille – gémit
s’en prend à son destin
le vignoble artère de ma vie
une langue disparue
qui tous les ans refleurit neuve
fait jaillir du noueux
par enchantement la grappe !
**Dénuement farouche
(Télégramme au vignoble)
mon aveu troublé ô vignoble
tu m’étais plus cher
en février dénudé et maigre
persévérant
ton triomphe a trop d’évidence
pardonne-moi ici seulement
je veux renoncer à tout vin
les fortunés ô vignoble
manquent de tout
les pauvres sarments
ont toute l’attente
aveuglante pour eux
**Fleur de sel
acquis une petite boîte
en Camargue mon souvenir granulaire
avec flamands roses pâles obligatoires
aux Saintes-Maries-de-la-Mer
entre mes pensées tsiganes
gagné la « rosée des salins » – fleurs de sel
cueillies par le saunier à Aigues-Mortes
les eaux défuntes pleines de floraisons de sel
en été quand le vent
cesse de parler
et des millions de cristaux de sel
affleurent à la surface de l’eau
voici que la mer
tire son voile de jeune mariée sur son visage
se couvre de sel se donne à reconnaître
le jardinier guette le moment
et rapide cueille
le cadeau plein de ruse
d’une mer qui s’amuse
de sel